par Fatima Mesref

Depuis quelques années, les médias ont pris une place de plus en plus grande dans nos vies. La façon dont l’information circule a, au fil du temps, changé drastiquement, et 2023 s’inscrit dans une époque où l’instantanéité règne et où tout peut être connu du monde entier en très peu de temps. 

À l’arrivée de la Covid-19, en 2020, on ne parlait que de ça, partout. Il n’a pas fallu longtemps non plus pour qu’en 2022, tous et toutes apprennent qu’il y avait eu escalade du conflit russo-ukrainien. Pourtant, l’actualité n’est souvent pas bien définie. L’actualité médiatisée connue de tous et toutes, c’est seulement la part de ce qui a été choisi pour être présenté. Parce qu’en soi, l’actualité se définit comme des « événements actuels intéressant un domaine d’activité » (Larousse, 2022), ce qui implique, même en se limitant au « domaine d’activité » de l’urgence et des crises, de nombreux autres incidents. Il faut commencer par rappeler qu’il n’est pas requis qu’une situation soit une nouveauté pour être couverte par la définition ; elle doit seulement être en vigueur.  C’est d’ailleurs souvent bien illustré par plusieurs situations autour du globe dont on ne parle pas nécessairement, mais qui méritent tout autant de visibilité.

L’actualité, c’est aussi les conflits qui durent depuis des années

La plupart des gens sont au courant que les choses vont mal dans plusieurs pays, mais puisque la situation prévaut depuis des années, un certain sentiment de normalité s’installe auprès de plusieurs. En entendant parler de ce qui se passe, on se sent souvent incapable de changer les choses malgré le petit pincement que nous fait ressentir notre inaction. C’est ce sentiment désagréable qui fait en sorte que souvent, on montre peu d’intérêt. Du moins, beaucoup moins d’intérêt que pour ce qui est très médiatisé, comme les états d’urgence mentionnés un peu plus tôt. Cependant, s’éduquer sur l’actualité sous-médiatisée, s’est en soit une façon de s’impliquer. Ainsi, faisons le tour des crises en cours en 2023, mais qui durent depuis des années. 

Le Yémen ; Sanaa comme capitale

 Situé au Moyen-Orient et bordé par l’océan Indien. En état de crise depuis plus de 8 ans. Des affaires politiques, un président qui refuse de céder le pouvoir, des rébellions, une guerre civile. Ce dont on entend parler en histoire lorsqu’on aborde les grandes guerres : des restrictions dans les importations, des pénuries dans tous les domaines, la perte d’infrastructures essentielles, la surcharge des services de santé. Pire encore, des combats, des bombardements et la peur des survivants. Avec l’arrivée de la pandémie de la Covid-19 en 2020, les choses n’ont fait qu’empirer. La sécurité était précaire (Al-Shami, 2015) et au fil du temps, une assistance médicale et humanitaire solide a pu être conférée par Médecins Sans Frontières (MSF) pour porter assistance à ceux et celles qui en avaient le plus besoin. Certains ont eu à faire face à la malnutrition, au choléra, à la diphtérie, à un besoin criant d’aide psychologique, à la rougeole puis enfin à la Covid-19, sans oublier la pénurie médicale reliée au conflit et au manque de ressources (MSF, 2023). Jusqu’à aujourd’hui, la lutte pour de meilleures conditions de vie est en cours et ne devrait pas être mise sous silence.

La Palestine avec Gaza comme ville principale

Enclave bloquée par Israël depuis 15 ans (Ingrès, 2018), la ville dévastée par la guerre connaît un manque accru en termes de soins de santé. Les déplacements à l’extérieur se trouvent d’ailleurs limités.  Afin de pallier la crise, des programmes spécialisés en trauma et brûlures, ainsi que des services de soins psychologiques ont été mis sur pied. Même si Médecins Sans Frontières a commencé ses activités là-bas en 1981 (MSF, 2022), le problème est, là aussi, loin d’être réglé. 

Le Mexique

Avec des villes comme Guadalajara et Mexico marquées par un flux de migrants qui ont parcouru de périlleux voyages (MSF, 2017). À défaut de pouvoir remédier aux causes d’une telle situation, les médecins de MSF ont mis en place des services de santé visant à appuyer les communautés locales ainsi que des services en santé mentale ; 7970 consultations individuelles avaient été faites en 2021. Malgré une nette amélioration de la situation initiale, le tout reste assez peu médiatisé.

Or, c’est aussi dans 38 pays d’Afrique, 13 pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, 19 pays des Amériques, 23 pays d’Asie et du Pacifique, ainsi que 40 pays en Europe et en Asie centrale qu’une assistance humanitaire s’est avérée bénéfique. Dans chacun des cas,  même si l’aide était souvent insuffisante à la gravité de la situation, même si peu de gens en entendent parler, des dévoués répondent à l’appel. Parce que oui, l’assistance psychologique au Mexique ou dans d’autres pays où de nombreuses personnes n’ont peu ou pas accès à des soins de santé, par exemple (MSF, 2019), c’est aussi d’actualité de nos jours. 

Pour réfléchir…

En somme, l’aide humanitaire est bien décrite par les mots-clés « urgence », « crise » et « soins ». La plupart du temps cependant, ces mots ne rendent pas justice à toute son ampleur. Ce n’est pas une intervention isolée lors d’une catastrophe environnementale ou un conflit dont il est question, mais plutôt une assistance à divers égards et à long terme qui nécessite des efforts soutenus. La prochaine fois que vous entendrez parler des soins prodigués lors de X ou Y événement par une organisation humanitaire, vous pourrez ainsi vous demander si un hôpital a dû être reconstruit plusieurs fois comme à Kunduz (MSF, 2017). Vous pourrez aussi vous souvenir de l’actualité que tout le monde semble oublier et, si la journée est belle, en discuter. 

Références

Beauchemin, M., & Pumont, M. (2022). La guerre en Ukraine : comprendre les origines du conflit. BAnQ. https://www.banq.qc.ca/explorer/articles/la-guerre-en-ukraine-comprendre-les-origines-du-conflit/

Médecins Sans Frontières. (s. d.-a). Kunduz hospital attack | MSF medical response. Médecins Sans Frontières (MSF) International. Consulté 19 janvier 2023, à l’adresse https://www.msf.org/kunduz-hospital-attack

Médecins Sans Frontières. (s. d.-c). Palestine | MSF medical and humanitarian aid. Médecins Sans Frontières (MSF) International. Consulté 19 janvier 2023, à l’adresse https://www.msf.org/palestine

Médecins Sans Frontières. (s. d.-d). Yemen in depth | MSF. Médecins Sans Frontières (MSF) International. Consulté 19 janvier 2023, à l’adresse https://www.msf.org/yemen-depth

Médecins Sans Frontières. (s. d.-e). Yémen : une population exsangue | Médecins sans frontières. Consulté 19 janvier 2023, à l’adresse https://www.msf.fr/decryptages/yemen-une-population-exsangue

Al-Shami, M. (2015, novembre). Safety and Security in Yemen: Main Challenges and Stakeholders | Wilson Center. Wilson Center. https://www.wilsoncenter.org/publication/safety-and-security-yemen-main-challenges-and-stakeholders

Bombardements à Gaza : « Les urgences se sont remplies en quelques minutes » | Médecins sans frontières. (2022, Août). Médecins Sans Frontières (MSF) International. https://www.msf.fr/actualites/bombardements-a-gaza-les-urgences-se-sont-remplies-en-quelques-minutes

Mexico | MSF medical and humanitarian aid. (2021). Médecins Sans Frontières (MSF) International. https://www.msf.org/mexico

Yemen: Eight years of war create perfect storm for humanitarian crisis | MSF. (2023, mars). Médecins Sans Frontières (MSF) International. https://www.msf.org/yemen-eight-years-war-create-perfect-storm-humanitarian-crisis